La peur de vivre
Conférence donnée par Jaya le 27 sept 2013 en cours de méditation
Les moments de doute et de découragement font partie de la nature humaine.
Nous courons une grande partie de la vie pour réaliser nos désirs et notre mental se crée bien souvent un monde fait d’illusions. Parfois cette illusion s’effrite et le constat est amer. Le sentiment de l’erreur nous habite et l’idée de poursuivre sur de nouvelles bases nous anéantit, tant le travail qu’il reste à faire semble immense.
Parmi les désirs omniprésents, celui de vouloir être en sécurité est un des plus importants, mais le désir de sécurité s’oppose en fait à la croissance spirituelle.
Les vies superficielles, matérialistes, sont sécurisantes certes, mais elles sont insipides, inodores, incolores.
Elles ont le même effet que les fleurs artificielles sur un tombeau ou dans votre salon.
De la même manière que nous ne sommes jamais en sécurité dans l’existence et que nous pouvons perdre une situation, un proche, la santé, l’argent ; de la même manière, pour le chercheur spirituel, nous pouvons retomber au bas de l’échelle à tout moment malgré des années d’efforts. Il suffit de renier, de douter, de trahir, d’oublier, de mal interpréter, de décrocher pour retrouver nos souffrances anciennes.
Une infime partie d’égo suffit à nous faire replonger.
La quête de l’éveil n’est jamais sécurisée tant que nous sommes pris au piège d’ahamkara, l’égo.
Vivre spirituellement, c’est accepter de vivre vraiment.
C’est accepter de vivre sans sécurité et rencontrer de façon permanente la vie dans tous ces aspects, des plus positifs aux moindres.
Les moments de doute ne doivent ni être regrettés, ni occultés. Ils sont là. Laissons donc les choses être ce qu’elles sont, mais en les acceptant, en les observant.
Nous ne sommes en sécurité que dans l’observation pure de ce qui se passe.
En devenant observateur, vous vous centrez. En étant centré, vous devenez plus serein intérieurement. Les peurs diminuent.
La vie peut alors se montrer dans toute sa splendeur lorsque nous savons la regarder.
Qu’entendons-nous par peur ? nous dit Krishnamurti.
La peur est ce qui nous relie à quelque chose ou à quelqu’un. Nous avons peur de quelque chose, de quelqu’un, d’une situation, d’un état, d’une émotion, d’une idée. Elle se base donc sur une relation à !
La vie est relation. Rien ne peut exister isolément.
Tant que la nature de nos relations au monde ne sera pas comprise et observée sereinement, nous entretiendrons toujours la peur.
Il y a chez l’être humain des peurs profondes qui influencent une grande partie de leurs actes. Ces peurs, telles que l’insécurité, la mort, la maladie, la misère, la solitude - si elles sont affrontées avec combat, résistance, bataille, défensives - seront ré-enfouies, prêtes à surgir à n’importe quel moment pour entretenir un réel conflit intérieur.
Il nous faut plutôt les comprendre, les regarder sereinement en face, les observer, les pénétrer.
La cause essentielle qui anime bon nombre de peurs au plus profond de nous-même, c’est de ne pas être, de ne pas devenir, de ne pas avancer.
Tant que cette angoisse nous habite, il nous est difficile de vaincre l’inconnu.
Souvent , nous avons peur davantage de l’idée du fait que le fait lui-même.
Redoutons-nous le fait tel qu’il est ou sommes-nous plus effrayés par l’idée que nous nous en faisons ?
La peur de la mort et la mort sont deux choses différentes.
Si j’observe un fait, sereinement et en étant centré, et que je rentre en communion avec lui, alors je ne le craindrai plus. Si je reste à distance, que je m’en fais une idée, une opinion, je risque fort de l’interpréter avec erreur.
Si je m’accorde la liberté d’observer le fait, je laisse le fait être là et je peux agir.
Ce qui cause la peur de quelque chose, c’est l’appréhension de ce que pourrait être ou faire cette chose. Mais cette appréhension est faite de nos opinions, de nos connaissances, de nos interprétations, de nos préjugés et non du fait en lui même.
Regarder un fait sans le traduire, en diminuera la peur que nous pouvons en avoir.
L’esprit, la pensée, amplifient nos ressentis en leur greffant des mots, des images. Le processus du langage qui consiste à nommer les faits, à nommer des sentiments les amplifie. Si ces sentiments relèvent de la peur, ils l’amplifieront.
Regarder la peur sans la nommer, la dissipe bien souvent.
Le sage, qui par l’observation du réel, a pu atteindre la connaissance de soi, a mis fin à la peur en lui.
La peur engendre parfois le doute, et nous démunit du libre arbitre.
Pourquoi sommes-nous bien souvent incapables de percevoir ce qui saute aux yeux ?
Pourquoi nous ne parvenons pas à savoir ce qu’il faut faire dans une situation ou ce qu’il ne faut pas faire ?
Le désir de percevoir l’évident vous interdit de le voir, nous dit Rajneesh.
Nous retombons sur la même problématique.
Lorsque vous instaurez une distance avec ce qui Est, vous ne pouvez pas voir ce qui est déjà là.
Nous tentons de comprendre quelque chose de compliqué, lointain et occulte, alors que c’est proche et évident.
Tout Est dans l’observation sereine de la vie, sous tous ses aspects.
Je vous dis toujours que vous cherchez le miraculeux au-delà, alors qu’il est déjà là.
La vie dans ses moindres choses, même banales, est témoin de ce qui EST.
Cet absolu est permanent en toute chose.
L’égo adore essayer de comprendre.
Certains ont gravi les plus hautes montagnes. Certains ont fait preuve d’une grande force d’âme pour cela, mais certains l’ont fait sans même connaître le centre de leur propre être.
Cela n’enlève rien à leur prouesse. L’homme est un conquérant.
Mais, de même que l’on admire la performance physique, de même si vous franchissez la porte de votre cœur, personne n’y prêtera attention.
L’ego pour survivre, doit vaincre, prouver, conquérir, se faire remarquer, s’affirmer, séduire.
De nos jours, nous développons à outrance ce culte de l’égo chez nos jeunes générations. Et des gens peu scrupuleux de l’éthique, font du business en mettant en scène dans des médias populaires, des jeunes ignorants dans l’arène des pièges de l’égo. Ces manipulateurs consolident ainsi de nouvelles valeurs chez une grande partie de la population mondiale qui suivent ces émissions télévisées. Cette pollution mentale de l’humain à grande échelle fait froid dans le dos.
Ce qui est évident nous échappe, parce que notre égo s’en détourne.
Il ne s’intéresse qu’à ce qui est éloigné, difficile d’accès, ce qui lui permet d’entrer en scène, de relever un défi, de gagner, de briller.
Mais que pouvons-nous trouver demain de miraculeux si aujourd’hui nous ne sommes pas aptes à voir ce qui est déjà là ?
Notre désir de voir nous empêche de voir.
Enlevez le désir et regardez simplement.
Observez ce qui se passe en vous, autour de vous.
Laissez le divin, la vérité, se révéler à vos yeux dans le silence et la quiétude de la méditation, dans le regard quotidien.
Le subtil vient chez celui qui se trouve dans un état d’Être.
Ce n’est pas Vous, avec vos bruits intérieurs, qui trouverez le subtil.
C’est le subtil qui vous trouvera si vous devenez silencieux et observateur.
Quand vous trouvera t-il ?
Demander « quand » signifie que vous êtes dans le futur, et cela est contraire à l’instant présent, à ce qui est réel.
Il n’y a donc pas de quand.
Hari om Tat Sat
bibliographie :
– « La première et dernière liberté » de Krishnamurti aux edts stock.
– « Tantra » de O.Rajneesh aux edts le voyage intérieur.
– commentaires et analyse de Jaya Yogacharya.