« Le Fascinateur »
Conférence donnée par Jaya le 22 nov 2013 en cours de méditation.
Le Fascinateur
Lorsque nous avançons sur le chemin du yoga, notre compréhension
des techniques devient de plus en plus profonde et l’ampleur du travail subtil qu’il reste à faire, illumine de façon exponentielle notre quête.
Cette science spirituelle est si complexe qu’elle nécessite la patience et l’enthousiasme. Celui qui a saisi ce fabuleux potentiel d’éveil et de connaissance qui s’offre à lui, saura appliquer avec humilité et constance, l’enseignement qui lui est donné.
Cet enseignement doit alors ouvrir pour vous et de façon graduelle de nouvelles portes, car le travail que vous avez déjà accompli, rend votre conscience prête à recevoir ce qui la fera grandir.
Il vous sera bien sûr toujours demandé de garder, parmi tous les outils nécessaires à l’acquisition de la connaissance, le discernement, Viveka.
Mais certains aspects de la connaissance spirituelle ne peuvent être compris par le seul intellect ni par un raisonnement purement scientifique.
Le yoga semble pour beaucoup de néophytes, une pratique déjà ésotérique en soi. Cependant, par son aspect postural et sa grande médiatisation, il est devenu accessible sur certains plans.
Toutefois, il existe des dimensions bien plus ésotériques encore et peu accessibles du yoga, voire peu enseignées.
Parmi celles-ci ;
– le Surya Vijnana (Surya signifie soleil et Vijnana est la connaissance),
– le Surya tantra (outil d’expansion de la conscience par le soleil).
Ces deux enseignements expliquent comment comprendre et réaliser la vitalité et l’énergie cachée dans le soleil.
Notre Maître Sri Sri Sri Satchidananda Yogi, le silencieux, était un yogi tantrique solaire de la main droite. Une grande partie de sa pratique reposait sur l’énergie solaire par :
- des trataks solaires (concentration fixe avec les yeux ouverts sur le soleil à une heure avancée) dont il était un grand spécialiste ;
- aux techniques de Chhayopasana (techniques de vision de l’avenir) ;
- en passant par la science des mudras solaires ésotériques révélant les pouvoirs ;
- des nombreuses variations de Surya namaskar (salutations au soleil parfois fort rudes en rétention, très intensives physiquement) et leurs bija mantras solaires associés ;
- les nombreux rituels et pujas dédiés à l’astre lumineux et aux concepts de force des divinités solaires dont Savitri, et Lalita tripurasundari ;
- la pratique des grands mantras solaires que sont le Sri Surya Stotram, le Sri Suryastakam, l’Aditya Hrdayam ;
- son alimentation prânique dont le prânisme d’aujourd’hui à la mode sur le web n’est qu’une pâle figure et dangereuse de surcroît, car pratiquée par des non initiés ;
- sa capacité à voyager toujours vêtu de son simple dhoti blanc et son short, quelque soit l’hémisphère et la saison, et indiquant sa maîtrise du feu intérieur ;
- la vénération que lui faisaient des milliers d’indiens en tant que yogi solaire, dans les temples à l’occasion d’une nouvelle construction.
Tous ces aspects cités ci-dessus définirent la nature de sa pratique.
Dans cette science du yoga solaire, la source de la lumière, le soleil est définit comme l’atman (l’atma, l’âme).
Ici l’âme est envisagée dans un sens différent de celui que nous lui donnons d’habitude.
L’âme est ici la source de la lumière, à la fois perceptible et imperceptible.
Le soleil est une réalité permanente pour nos courtes existences.
Combien de temps brillera t-il après notre mort ?
Peu importe, il sera voué à l’extinction lui aussi.
Mais son principe dans l’univers (ou multi-univers) est là, comme principe d’énergie. Difficile pour nous d’appréhender l’avant et l’après.
Pour les sages, la connaissance de l’âme est recouverte par le voile de nos limitations, voir principe d’adhyaropa.
Il en est de même pour notre quête de la connaissance du réel.
L’aspect ésotérique des pratiques yoguiques est de connaître le principe lumineux en toute chose, et d’en avoir la perception.
Le soleil devient donc un support à cela.
Les supports de visualisation dans les pratiques tantriques que sont par exemple les yantras, les mandalas, n’ont pour but que de souligner les analogies entre l’individu et les énergies de l’univers. La visualisation ne s’arrête donc pas à l’aspect artistique ou formel du support, mais à l’énergie avec laquelle ces formes ont été conçues.
Quand les yogis et les tantrikas ont élaboré les pratiques permettant d’intégrer le potentiel solaire, ils considéraient l’astre comme un symbole pour saisir l’énergie, la vitalité et l’origine de la lumière.
Leur conception repose sur le concept d’éternel rayonnement.
Pour les yogis, l’atma, l’âme, est ce principe lumineux, ce centre lumineux de tous les êtres. Et son éclat est éternel.
Le soleil n’en est qu’une manifestation secondaire.
Les Tattwas que sont les cinq éléments, (Prithivi, la terre - Apas, l’eau - Agni, le feu - Vayu, l’air et Akasha - l’éther), sous-tendent toute manifestation du monde phénoménal selon la tradition orientale.
Mais une vision plus large de l’univers considère qu’il y a d’un côté le plan divin, voire éternel, le divya loka (ou deva Tattwa), et de l’autre le périssable Mrityu Loka, (mrityu tattwa). La rencontre de ces plans crée un élément prânique, le prâna tattwa.
Nous dirons donc que le Prâna Tattwa est tout phénomène énergétique.
Parmi les nombreux phénomènes énergétiques, l’être humain en est un très complexe.
Notre capacité de cognition et d’expérience peut nous permettre de percevoir les degrés des différents plans qui nous constituent par la perception des tattwas, du plus subtil au plus périssable. Bon nombre de méditations portent d’ailleurs sur eux.
L’identité humaine dans sa corporalité représente l’aspect dynamique. La connaissance de l’atma, est l’aspect immuable.
Dans le yoga, nous expérimentons cela par le corps et le système des chakras. Ces vortex énergétiques sont reliés à des plans physiologiques mais aussi psychiques.
Ils sont eux aussi à l’image du Prana Tattwa.
D’un point de vue ésotérique, le soleil est donc considéré comme une lentille à travers laquelle nous percevons la luminosité de l’esprit. Les yogis vous diront que dans le corps humain, les chakras sont ces portes permettant cette expérience de perception. Ils vous diront de même que les yeux sont l’autre outil disponible, car ils sont le miroir reflétant la nature de l’atma.
Les yeux ne peuvent pas engendrer d’action précise, ils ne peuvent que regarder et percevoir.
Cette capacité d’observation permet d’accroître notre conscience du Soi, voire sa luminosité.
Si vous faites un feu, plus vous y mettez de brindilles, plus hautes et brillantes seront les flammes.
Dans la faculté de vision, plus vous la stimulerez, plus vous augmenterez la connaissance de la perception due à la lumière intérieure.
Tous les exercices de concentrations poussées sur le soleil, sur une flamme, en sont l’exemple.
La matière n’est pas vue à ce moment là comme telle, mais comme énergie, comme vibration.
Toutes ces techniques de vision que sont les shambhavi mudra, nasi kagra drishti mudra, trataks, ont pour but d’agir sur la conscience, d’y créer un changement. Notre représentation habituelle de la matière, de sa forme, se transforme alors en une expérience extra-sensorielle, capable d’appréhender l’énergie au-delà.
Le yoga travaille donc à la vision extra-sensorielle et l’éduque et la tradition Surya met l’accent sur les trataks des objets lumineux.
Le mouvement qu’est le Phosphénisme du Dct Lefebure répond à ce principe. Là encore, nous voyons comment le yoga est à l’origine de beaucoup de pratiques ultérieures.
Les concentrations ou stimulations du feu Agni dans manipura chakra font partie également de cette démarche.
Les pranayamas du feu, (kapalbhati, Bhastrika, Agni Sara), les stimulations de Pingala nadi (Surya bedha), les nadi-shodan avancés associés à la Gayatri mantra, le japa de la Gayatri elle-même, participent à ce même objectif.
Mais il va sans dire que ces pratiques nécessitent comme dans tous les autres domaines du yoga, la conscience et la maîtrise mentale. Il existe de nombreuses techniques qui ne peuvent être révélées n’importe comment et à n’importe qui, d’où l’utilité d’un guide.
Toutes les branches du yoga parlent de la nécessité d’activer les chakras et d’endiguer les trajets énergétiques du flot du Prâna, de l’énergie.
C’est de ce concept que se sont développés, la science de la kundalini, le kriya yoga mais aussi le ha-tha yoga, sans oublier le Raja yoga.
A travers les âges, le soleil a toujours exercé une étrange fascination sur l’esprit humain. Sa lumière et sa radiance ont inspiré bien sûr les Rishis Védiques, glorificateurs de sa levée du jour et de son pouvoir inexhaustible.
Il occupe une place privilégiée dans le panthéon védique, car il est la source de celui qui soutient la vie. Utilisé pour son pouvoir de guérison, de désintoxication, ses rayons furent vénérés comme porteurs de joie et de prospérité. Dans l’Inde ancienne, la science spirituelle sur le soleil était considérée comme étant une des plus efficaces pour réaliser les désirs.
Surya signifie le lumineux, celui qui s’irradie lui même, la force créatrice omnisciente, la personnification de la vérité.
La vérité est la lumière.
Cette déclaration millénaire est toujours d’actualité et plus que jamais avec le discours scientifique.
La vérité est la lumière et elle est le corps de Surya.
Dans le panthéon hindou, Sūrya (de la racine sanskrite sur ou svar, briller) est le dieu soleil, fils d’Aditi la déesse mère et de Kashyapa, le père de tous les hommes et tous les dieux. Il a quatre épouses, Samjnâ la connaissance, Râjnî, la souveraineté, Prabhâ la lumière et Châyâ, l’ombre. C’est le père de Manu, le premier homme et le législateur de l’humanité, mais aussi de Yamâ, le dieu de la Mort et de Yamî, sa sœur, symbole du jour et qui deviendra, après sa mort, la rivière Yamunâ , un des trois fleuves les plus sacrés de l’Hindouisme.
Surya est généralement représenté comme un guerrier, chaussé de bottes, et sa peau est cuivrée. Il porte de nombreux bijoux à l’éclat resplendissant. Sūrya se déplace dans un char conduit par Aruna (qui signifie aurore) et tiré par sept chevaux ou un cheval à sept têtes, représentant les jours de la semaine.
Il a quatre bras :
- dans le bras supérieur droit il tient le Chakra, le disque solaire ;
- dans la main supérieure gauche, la conque (Shank), symbole de l’océan primordial et du son initial ;
- dans la main inférieure droite, le geste de protection, (Abhaya ) ;
- dans la main inférieure gauche, il tient Padma, le lotus, symbole de la spiritualité.
Il est le chef suprême des Navagrahas (les planètes et éclipses de son propre système).
Il est la forme céleste du feu Agni parce qu’il se consume lui même et et symbolise ainsi le sacrifice cosmique. Il est appelé Pavaka le purificateur, Ravi le diviseur, Jayanta le victorieux ou Jivana la source de vie.
Il est source de lumière et de chaleur, gouverne les saisons et fait mûrir les récoltes.
Aveuglée par ses rayons, Samjnâ ne supportait pas d’être auprès de son mari. Pour adoucir ses souffrances, Vishwakarma enleva à Surya un huitième de ses rayons. Avec les morceaux de rayons tombés à terre, il confectionna le disque de Vishnu et le trident de Shiva.
Surya est également assimilé à l’œil droit de Nataraja (représentation de Shiva, le danseur cosmique), son œil gauche étant Chandra, la lune.
Le temple le plus célèbre qui lui est consacré se situe à Konarak près de Puri.
Certains d’entre vous ont reçu de ma part un mantra solaire.
Ce mantra leur a été donné dans un contexte bien précis, à un certain moment de leur pratique ou de leur cheminement de vie. Ayant été initiée à cet art subtil, je suis à même de vous le transmettre lorsque ce sera le moment. Les mantras peuvent se trouver dans des livres certes, mais la passation d’un mantra doit être faite d’un guide à un aspirant avec la charge énergétique et psychique nécessaire, afin qu’il devienne un outil puissant pour votre éveil.
Je donnerai donc à ceux qui n’en ont pas, lorsqu’il sera temps, ce fabuleux outil.
En attendant, essayez désormais de regarder le soleil différemment.
Il vous reliera à votre conscience « d’êtreté », qui fait de vous un être humain à grande potentialité d’éveil.
Hari om Tat Sat
Jaya Yogacharya
bibliopgraphie :
« Suryaradhana » de Sri Sri Sri Satchidananda Yogi.
« Yoga Darshan » de Paramahamsa Niranjanananda aux edts Swam.
Commentaires et adaptation de Jaya Yogacharya.
Messages
1. Le Fascinateur, 3 décembre 2013, 13:38, par Jaya
Bonjour Jaya,
Merci pour cet enseignement lumineux toujours bienvenu le lundi matin. Je m’interroge en ce moment sur mon cheminement émotionnel. Bien qu’étant élève débutante et trouvant déjà un apaisement à travers la pratique et la méditation, je reste soucieuse à l’idée de trouver un équilibre entre empathie et affirmation de soi, don de soi et besoin de ne pas "perdre son temps" en compagnie de membres de ma famille ou de mon entourage professionnel qui demandent beaucoup d’énergie ou génèrent de l’agacement par leur obstination à choisir des voies qui les font souffrir ou induisent de la souffrance pour les autres... J’ai souvent le réflexe de fuir et me replier sur moi-même pour me protéger des émotions qui pourraient me submerger et induire de la négativité... Avez-vous déjà donné une conférence sur ces sujets ?
Merci de votre bienveillance
Magali
1. Le Fascinateur, 3 décembre 2013, 13:41, par Jaya
Bonjour,
Il vous faut grandir et perdre les illusions sur la nature humaine.
Autrement dit, vous ne pourrez aider quelqu’un qui ne veut pas être aidé.
De plus, le travail spirituel est avant tout le vôtre, et c’est déjà en soi une lourde tâche qui pourra vous prendre des années. Prenez donc soin de votre être et de vos réels besoins.
Aidez, servez, aimez, mais construisez-vous en premier. Ne permettez à quiconque de vous empêcher d’avancer et tenez votre pratique dans la discrétion et l’efficacité. Le chemin sera long, mais un jour, si constance, vous brillerez plus encore et c’est à cet éclat là, que ceux qui vous aiment, comprendront le travail qui leur reste à faire.
Courage donc sur cette voie.
Hari om
Jaya yogacharya
2. Le Fascinateur, 30 avril, 04:48, par Marc medvesek
Merci Jaya pour cet enseignement...
" L’aspect ésotérique des pratiques yoguiques est de connaître le principe lumineux en toute chose, et d’en avoir la perception" : c’est l’art de s’adresser aux choses... les caresser de notre considération, les aimer pour ce qui dort en elles parce que tout participe à notre propre vie, une façon d’avoir un regard plus mûr...