Le défi de vérité
Conférence de Jaya Yogacharya faite en cours de méditation du vend 11 dec 2015
Depuis quelques temps, dans mes conférences, j’ai quitté momentanément les aspects techniques de l’éveil concernant l’ajna chakra mais cela ne signifie pas pour autant que nous en avons abandonné l’étude, bien au contraire. Je ne lâche pas le fil.
J’insiste beaucoup plus dans mes dernières interventions, sur le « Maha manas », le grand mental, qui siège dans le divya shaksu, l’œil divin et qu’il nous faut transcender pour tendre vers la compréhension subtile de l’expérience spirituelle.
J’insiste donc sur le fait qu’il vous faut, si vous désirez réellement avancer dans votre vie spirituelle, et donc dans votre vie tout court, prendre tous les évènements qui vous arrivent comme des travaux pratiques afin d’expérimenter votre compréhension de l’enseignement.
Il vous faut donc comprendre et mettre en pratique les grands concepts abordés. Cela seul permettra le changement profond nécessaire pour votre avancée.
Dans cette quête, le défi le plus grand est celui de la vérité.
La quête de la vérité, c’est le défi à chercher, c’est le défi à être. Ce n’est pas quelque chose que vous posséderez un jour, c’est quelque chose que vous devez devenir. Mais, vous ne pouvez devenir que ce que vous êtes déjà.
Qu’est-ce à-dire ?
C’est comprendre dès à présent et enfin une bonne fois pour toute, que vous êtes un fruit de la conscience cosmique et de son désir de manifestation, et non un petit ego temporel enchâssé dans sa galère de vie.
Le défi de la vérité est celui de trouver votre dimension universelle, et cette dimension là, vous la trouverez dans votre centre le plus intime. Elle est ce centre.
La quête de la vérité, c’est comprendre qu’il vous faut rentrer chez vous pour la trouver.
C’est le défi de vous reconnaître, de vous connaître, de vous rencontrer vous-même, et Dieu que cela est une tâche difficile.
Se faire face est une épreuve, tant nous avons investi dans l’ignorance. Toute votre vie, dès la plus tendre enfance, vous avez investi dans l’ignorance à votre insu, et c’est pour cela qu’en vieillissant, des prises de conscience d’un travail essentiel et urgent peuvent se faire.
Mais voilà, la connaissance de soi devient de plus en plus en difficile. Le temps presse, les soucis et responsabilités sont nombreux, les poids sont lourds sur les épaules, les engagements sont des boulets.
Beaucoup de gens sont dans cet appel d’eux-mêmes, mais beaucoup se méprennent et se leurrent, tant peu d’entre eux sont capables d’être persistants pour y répondre.
En fait, tout le monde est appelé par l’univers à prendre conscience de sa vraie nature, c’est une invitation ouverte à chacun et à tous.
C’est à cause de ce défi que nous sommes là dans cette existence. Nous sommes là parce qu’il nous faut traverser le feu de la vie.
Mais sommes-nous là pour être juste consumés par ce feu et subir cette grande combustion cosmique de la chair, ni plus ni moins ?
Sommes-nous là pour vivre une expérience bien précise ? Cette expérience de la vie, pour le commun des hommes, s’apparente à une réelle transformation du corps et de l’esprit. Cette transformation, malgré le vieillissement et l’oxydation cellulaire, ne serait-elle pas finalement un processus de perfectionnement pour la conscience ?
C’est du moins ce qu’affirment les sages !
Traverser la vie, c’est un sacré pari pour chacun d’entre nous.
Il s’agit de tout risquer, et quoique vous en pensiez et bien que vous teniez bon à vos attachements, vous risquez tout dans l’existence.
L’ironie, c’est que lorsque vous n’avez rien, intérieurement bien sûr, vous avez très peur de le risquer.
Heureusement, la nature humaine fait aussi que lorsque vous avez quelque chose, vous pouvez avoir le courage de prendre des risques.
Les personnes riches intérieurement ont une plus grande capacité à abandonner ce qu’elles ont paradoxalement, voire s’abandonner. Celui qui n’a rien a très peur de s’abandonner car il a peut-être peur de rencontrer son propre néant s’il abandonne ses défenses, et sera devant le constat de son vide intérieur et de sa pauvreté spirituelle.
Il vaut mieux prétendre être riche et ne jamais regarder à l’intérieur.
Lorsque vous avez une richesse en vous, vous avez le courage de risquer et lorsque vous risquez, vous devenez capable de recevoir davantage.
Dans cette logique, lorsque vous risquez tout, vous devenez capable de recevoir le divin.
Bien sûr, ce n’est pas une invitation à faire n’importe quoi et à mésestimer les lois de la préservation.
Le défi de la vérité, le défi d’être, c’est donc de comprendre qu’il n’est nul besoin d’aller nulle part pour trouver l’extraordinaire. Le divin est déjà là en vous. Nul besoin de le chercher bien loin. En le cherchant même ailleurs, vous risquez de ne jamais le trouver.
Le défi de la vérité ne vient pas de l’extérieur, mais il vient de notre cœur le plus intime.
C’est peut-être le plus extraordinaire voyage qu’il vous soit donné de faire que de trouver votre centre.
Lorsqu’ un guide spirituel vous parle, prend le temps de porter ses mots à votre conscience, c’est votre propre voix intérieure qu’il essaie de vous faire entendre.
Observez comment vous êtes extérieur à vous-même ! Parfois, vous êtes si décentré,
votre cœur intime est si coupé avec vous-même que ce n’est que par des appels
extérieurs à vous que vous le sentez. Vous êtes devenu si inconscient que lorsque votre propre âme vous appelle, vous croyez que quelqu’un d’autre le fait.
Elle vous appelle par les sollicitations extérieures, visuelles, émotionnelles, sensibles. Vous êtes touché !
La relation entre un professeur et un étudiant n’est pas une relation personnelle.
La relation entre un guide spirituel et un aspirant est une relation personnelle, c’est une histoire d’amour.
Il s’agit de sentir, d’être dans la présence de l’autre, il s’agit d’observer. Il s’agit d’écarter l’ego et le mental et de se regarder directement, de se voir.
Ce n’est que lorsque vous vous intéressez à l’être, lorsque vous sondez directement le cœur le plus intime d’une personne, lorsque vous commencez à sentir la présence du divin en elle, alors seulement vous devenez un être spirituel.
Observez notre monde d’aujourd’hui. C’est un monde qui s’accélère, qui s’affaire tant et si vite que les êtres stressés, angoissés, tourbillonnants sont de plus en plus nombreux. Même vous, pratiquants, n’êtes pas à l’abri de ce processus.
Les laideurs de ce monde refont surface encore aujourd’hui malgré les erreurs du passé. Ce n’est pas le divin qui a crée les atrocités que nous connaissons aujourd’hui encore.
Le divin, Dieu si vous vous voulez, n’a jamais créé ce monde-ci. Ce monde est la création des hommes.
Le divin a créé un monde, mais la majorité des hommes ne savent rien de ce monde-là.
Le divin n’a pas créé ce monde-là où existent la cruauté, les attentats,
les dictateurs. Ce monde-là, le divin ne l’a jamais créé. Ce monde-là où existent le fanatisme, la pauvreté, l’avidité, l’individualisme à outrance, où la vie est si laide, où rare est le moindre signe d’amour, est un monde de rivalités, d’êtres en conflits, où règne une très grande violence.
Nous y sommes immergés malgré nous et y serons de plus en plus.
Comment en échapper ?
Les esprits simples vous diront que Dieu, ayant créé l’homme, en est de ce fait responsable.
Ce qu’il nous faut comprendre, c’est que le divin a créé l’homme libre.
L’homme est libre de devenir un sage ou un fanatique.
Le monde aurait peut-être été bon si le divin ne nous avait pas créé libre, s’il avait fait de nous des machines bien huilées, parfaites.
Mais personne n’aurait fait la "toccata et fugue en ré mineur" ou n’aurait écrit « Ainsi parlait Zarathoustra ».
L’univers nous a créé libre. Bien sûr, dans cette liberté, l’opposé est impliqué. C’est là la gloire de l’homme et son terrible destin.
Il est libre d’accomplir sa destinée et son monde est fait à partir de cette liberté. Chacun a sa propre responsabilité. Le divin ne vous oblige pas à devenir un bouddha si vous préférez être un musicien de hard rock.
Le divin vous a donné des outils si puissants que vous pouvez aller dans toutes les directions. Cette marge là contient aussi le risque d’égarement.
Rien ne peut être comparé à la beauté de l’homme car c’est un être libre.
Sa beauté vient aussi de ce qu’il peut être un Jésus ou un Judas et chacun porte en lui les deux possibilités.
L’homme est donc responsable du monde qu’il a créé à partir des outils fantastiques qui lui ont été donnés.
Et c’est parce que nous avons cette liberté en nous, que ce monde peut être changé, radicalement changé.
Ce n’est pas en écoutant des politiques immatures ou des prédicateurs religieux que vous changerez votre conscience.
Quant à dire pourquoi Dieu a créé le monde ? C’est considérer qu’il est séparé de sa création, nous dit Rajneesh, comme s’il avait créé le monde et qu’un jour, il l’avait totalement oublié.
Le divin est une créativité dynamique qui est notre propre essence. C’est un processus en perpétuelle création. Le divin tient bon, il soutient encore le monde par cet élan créatif permanent, ces nouveaux matins de l’ancien jour qu’il rafraîchit pour nous.
Je voudrais finir l’année avec ces mots du poète et sage Rabindranath Tagore, qui nous dit ceci :
« Chaque fois que je vois un nouveau-né, je regarde le ciel et je dis que Dieu espère encore. Un bébé est un espoir. Bien sûr, il a échoué avec la vieille génération, alors il crée une nouvelle. Et Dieu se dit : « Voyons, peut-être cette fois-ci, vais-je réussir. » Son optimisme est infini. Il est comme un poète qui compose chaque jour de nouveaux poèmes. Chaque jour il se sent un peu satisfait et un peu insatisfait - satisfait parce que quelque chose a jailli dans la poésie, quelque chose a été saisi, un rayon de lumière, mais quelque chose manque encore.
Demain matin ce sera un nouvel essai ! »
Nous aussi nous pouvons espérer, car dans l’espoir de la vie se trouve également notre espoir.
Le divin n’a jamais créé le monde, il le crée encore.
Il nous fait confiance.
Plus que jamais, nous devons agir, trouver notre vérité, notre grandeur spirituelle,
en essayant de tracer avec notre liberté et notre conscience des chemins meilleurs pour
ce monde en souffrance.
Je vous souhaite à tous, vous chercheurs spirituels, pour cette fin d’année, de trouver en vous la force d’être suffisamment créatif pour transformer la souffrance de l’autre en lueur d’espoir.
Hari Om tat Sat
Jaya yogacharya
Bibliographie :
« La voie de l’amour » d’Osho aux edts le Relié.
« Je suis Cela » de Swami Muktananda aux edts Saraswati.
Adaptation et commentaire de Jaya Yogacharya.