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"Aum-Al-Manas"

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Il reste quatre cours de méditation et conférences « en live » avant les vacances, comme il est dit dans le jargon médiatique et qui seront doublés bien sûr en visioconférence. Après ces contraintes de pandémie durant plus de deux ans, l’enseignement connecté a permis au Centre Jaya, de ne pas fermer ses portes en assurant, non sans mal, la continuité de l’entreprise. Il a également permis à tous les élèves de garder le fil conducteur de l’enseignement et de ses différentes pratiques.
Nous espérons pouvoir continuer longtemps à maintenir ce fil avec vous d’une manière ou d’une autre. Toutefois, rien ne vaut, tant que nous sommes encore là, de partager le vivant ensemble.

Je voudrais remonter le temps avec vous.
Souvenez-vous, en 2016, j’ai fait quatre longues conférences où, sous couvert d’un long périple d’une caravane que nous formions, par analogie au Centre Jaya, nous avions rythmé ce premier voyage par quatre exposés dont les titres étaient : Le Chemin, la Caravane, le Bivouac, le Lieu Saint et que vous trouverez sur le site. voir conférences.
J’y avais abordé les grandes lois universelles qui nous gouvernent et analysé comment elles concernaient le commun des mortels et différemment le yogi.
Nous étions finalement arrivés, au terme de ces quatre conférences à celle du « Lieu Saint », sans temples ni effigies. Je la finissais en vous disant ceci.

« Pour nous donc, ce soir, pas d’icônes, pas de lieu de culte, juste le ciel, la chaleur du désert. La luminosité de la nuit donne aux dunes la majestuosité des temples de nos visions. La perception de l’infini et du cosmos dépasse le sentiment du fini. Le lieu simple de l’ici et maintenant devient le "Lieu Saint" par la seule perception du sacré qui nous renvoie une ouverture ressentie comme absolue. 

Nous avons fait un si beau voyage !

Là-bas, derrière la plus grande dune, la civilisation vous attend...

Hari om tat sat
 »

Le vent a balayé depuis…pour chacun d’entre nous…
Qui est reparti vers le monde, vers la vie, dans les villes ?
Que nous est-il arrivé ? Quelle route avons-nous suivie ?
Qui a quitté la caravane ? Qui s’est perdu dans le désert ou les mirages ?
Qui a subi des dommages ? Qui est encore vivant ? Qui est mort ou qui a perdu des proches ?
Qui marche toujours à nos côtes malgré les tempêtes de sable aux virus étranges, malgré les voleurs spirituels de grand chemin aux dialectes curieux ou aux tatouages peu apodictiques.
Qui a renforcé son avancée d’un pas plus noblement cadencé, en étant plus sûr de lui désormais, et, sur sa haute monture, partage, toujours à nos côtés, ce chemin subtil.
Il est parfois aride. Nous y sommes souvent assoiffés de connaissance. Nous y sommes parfois las des efforts faits mais nous restons toujours constants.
Nous y sommes aussi à l’occasion guerriers pour nous défendre.
Nous y sommes le plus souvent protecteurs, bienveillants et enjoués, parfois totalement relâchés car contemplatifs. Nous y sommes enfin, observateurs vigilants et confiants pour scruter l’horizon élevé et avancer vers lui.
Nous y sommes responsables.
Nous sommes les chercheurs célestes et avons dans nos bagages, des vérités insoumises.

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Nous arrivons ce soir à Aum al-Manas ॐ मनस्, la belle oasis où l’esprit peut s’apaiser par la contemplation. Nous laverons nos pieds de la poussière, enlèverons nos "masques foulards" de nos visages, libèrerons nos corps par l’eau pure et tranquille. Nous offrirons notre prétention fatiguée au feu purificateur du brasier convivial. Nous lâcherons enfin le regard.
Après une pause de plusieurs jours, nous reprendrons le chemin vers Triveṇī त्रिवेणी, le prochain caravansérail, que nous atteindrons dans quelques semaines.
A ceux qui veulent préparer leurs baluchons légers ou leurs lourds cabas, qu’ils viennent nous y rejoindre, au cinquième jour de la semaine, à la lune montante, afin de nous regrouper. Nous entreprendrons un nouveau périple méditatif de quelques conférences et nous dirigerons vers une contrée nouvelle. Nous ne savons pas encore de quoi il sera fait ni comment il sera fait.
Si nous prenons le chemin du désert, nous serons toujours localisables.
Nous sommes en l’an des GPS..( Grands Pratiquants Spirituels).

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Mais, avant ce départ de Triveṇī, je ferai d’abord ce soir la synthèse des enseignements du premier voyage de l’époque en reprenant en raccourcis, les onze premières lois universelles que nous avions vues.
Je commencerai ensuite la présentation de quelques personnages futurs de ce nouveau voyage, à savoir Vous, mes chers amis, élèves.

Quelles furent donc ces premières lois ?
Rappelez-vous ! Tout être humain est soumis à des lois universelles qui le gouvernent et chacun, en fonction de son chemin de vie, se doit de les comprendre.

1ere loi ; -Nous ne disposons en apparence que de l’instant présent.
Nous apprenons à vivre dans l’instant présent afin de développer la conscience de ce qui est et voir la réalité telle qu’elle est et non telle que nous voudrions qu’elle soit.
Les yogis, par la pratique, peuvent expérimenter le Kāla darśana काल दर्शन (vision du temps) qui leur donne accès au secret du monde temporel.

2e loi ; -La nature est le premier pouvoir.
Connaître la nature, c’est assurer une vie basée sur la préservation.
Pour le yogi, la connaissance de ce pouvoir est celle de l’énergie suprême, la śakti शक्ति dont il peut faire l’expérience directe.

3e loi ; -Nous ne sommes pas isolés.
La solitude et la séparation avec l’absolu sont illusion.
Nous sommes tous unis par notre nature cosmique.
Le yogi réalise cela par la connaissance de la nature divine de son âme individuelle.

4e loi ; -Nous sommes libres de nos choix.
Le libre arbitre est une arme à double tranchant, mais nous pouvons changer en positif le cours de notre vie.
Le yogi est responsable de sa pratique et de son engagement spirituel.

5e loi ; -Pour avancer sur le chemin de la vie, chaque jour est un pas nécessaire.
La patience et l’effort transcendent le temps et permettent de réaliser les idéaux de vie.
Pour le yogi, le chemin passe par Abhyāsa अभ्या, la pratique régulière et ininterrompue.

6e loi ; - La survie permanente de l’être humain crée en lui une tension intérieure, un état de qui-vive.
Le lâcher-prise ouvre en soi l’état de confiance.
Pour le yogi, la liberté commence par la transcendance du mental.

7e loi ; -Le sens profond de l’existence de l’univers a pour nous une signification vitale.
Il est donc important de vivre sa propre vérité en accord avec celle de l’Univers.
Pour le yogi, c’est avoir la connaissance de l’Ātman आत्मन् , afin d’en assurer la fonction dans son existence.

8e loi ; - Une plus grande perfection est toujours possible.
La pensée engendre l’énergie de l’action et le pouvoir de l’esprit humain lui permet de changer et de perfectionner sa réalité.
Le yogi transcende le corps et l’esprit afin d’atteindre l’état subtil qui ouvre les portes de la sagesse.

9e loi ; - L’action nous amène à la compréhension et transforme la connaissance.
Ne cessons jamais d’actualiser le savoir par l’action.
Le yogi mène patiemment l’action de transformation de son être entier.

10e loi ; -Chacun de nous fait de son mieux, non pas ce qu’il veut, mais ce qu’il peut !
L’univers ne juge pas mais nous donne la loi du karma कर्मन्.
Ainsi donc, il est préférable d’aimer l’autre avec sérénité en devenant soi-même authentique.
Le yogi doit se déconditionner des carcans comportementaux de la société et devenir un être authentique en utilisant l’arme délicate de la sincérité.

11e loi ;- L’absolu œuvre en chacun de nous.
La foi, la confiance sont ce qui nous relient directement à la conscience universelle.
Pour le yogi, « Il est Cela. »

Le soleil se couche à présent sur l’oasis. On entend le blatèrement des animaux qui passent ...parfois avec leur tuning...

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Pour l’instant, Kikimjo l’asiatique, se repose, assise et somnolente contre un palmier. Elle ne sait pas encore que nous allons parler d’elle.
Lors de nos voyages, elle est toujours juchée sur son même dromadaire, qui n’est pas le plus grand de tous mais qui n’en est pas moins majestueux, au vu de la taille moyenne de Kikimjo.
Kikimjo porte son turban autour du front pour retenir la sueur des ans passés.
Kikimjo s’empresse toujours pour arriver avant nous tous au caravansérail.
Et savez-vous pourquoi ?
Ce n’est pas pour prendre la meilleure place pour sa monture, mais pour en réserver deux lorsque nous arrivons lentement, un à un, fatigués, et que le dernier n’a pas d’endroit pour placer la sienne. Kikimjo attend là pour lui en proposer une à côté d’elle.

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Kikimjo sait faire d’excellents desserts au coco râpé et à l’agar-agar et nous en sommes tous friands après les rites d’offrandes aux esprits des dunes, au maître du désert.
Elle n’oublie jamais d’en apporter.
Même si l’eau se fait rare, elle fait ce dessert avec la rosée de l’aube et les algues desséchées qu’elle emporte dans son baluchon. Voilà pour elle un bien précieux, un bien pour l’offrande au sacré et pour le bien-être de l’autre.
Elle en fait toujours davantage pour en donner aux gourmands qui attendent sans le dire.
Lorsqu’elle vient me rejoindre à la tente centrale, elle ne manque pas d’aller saluer un petit bout de femme de plus de quatre vingt dix ans, asiatique comme elle et qui ne mesure qu’un mètre dix tant son dos est courbé à force d’avoir frotté, frotté, astiqué, fait briller sa jolie tente blanche salie par les vents chargés du sud.
Lorsque nous prenons la route, nous amarrons toujours à un cheval placide et qui connaît bien le sentier, ce petit bout d’être et ses quelques paquets. Parfois, lorsque la nuit, nos guetteurs sont épuisés, ce petit bout de femme qui ne dort jamais, fait le guet à son tour. Si son dos est cassé, son genou est encore vif, elle court vite et son œil est plus rapide que le plus rapide des fennecs des sables. Petite perle que voilà !

Kikimjo pratique à nos côtés depuis si longtemps nos étranges postures. A son âge mûr mais non canonique, son corps mince et souple défie le commun des mortels, tout cela dans une constance et une régularité exemplaires.
La seule fois où elle dérogea à sa pratique avec nous, c’était lors des périodes de confinement où nous étions coupés du monde et calfeutrés dans nos tentes, suite à un nuage toxique au-dessus des sables et venu de la lointaine contrée de Wuhan, dans le grand Est.
A cette période-là, elle ne put se connecter que télépathiquement à défaut d’être dans notre tente centrale, la sienne étant coupée par plus de cinq cents pas de sable de la nôtre.
Lorsque nous apprenons inlassablement de nouvelles choses, parfois complexes à retenir, Kikimjo sait toujours répondre et le fait sans zèle. Elle sait attendre la prise de parole.
Elle n’en reste pas moins forte et volontaire, capable d’actions efficaces et discrètes.
Dans la caravane, elle est un membre incontournable et précieux.
Longue vie à Kikimjo.

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Et puis il y a Reg, l’incontournable.
L’anagramme de son prénom donne REG, qui est un désert rocheux, mais aussi ERG, un désert de dunes.
Alors que nous commençons tous à somnoler de notre chaude journée, dans la nuit claire, la brise chaude murmurant à nos tempes les mots étouffés du jour, Reg s’affaire encore.
Ramassant une herbe étrange dans un buisson, Reg la respire, l’analyse, hoche la tête puis la met dans un petit tissu vert sorti de sa poche. Ses mains ne cessent d’expérimenter la terre, sa flore, sa mini faune parfois, les préférant souvent à la compagnie des humains. Cependant, elle les aime aussi à sa façon par sa présence fidèle au karma कर्मन् , quand il s’agit de leur rendre service.
Reg est imprévisible.
Lors de nos longues marches sous le soleil harassant, nous pouvons la voir passer, montée sur son struthio, grand oiseau terrestre puissant et rapide, aux plumes noires, au bec plat, au long cou et aux fortes cuisses.
L’animal est d’ailleurs aussi imprévisible que sa cavalière. Mais Reg maitrise toujours ou donne toujours le change de la maitrise dans les situations périlleuses.
Parfois Reg aime bien basculer sa conscience dans des états modifiés. Elle devient immobile et médite...
Reg aime la musique et sait mettre à ses oreilles et à celles de sa monture, les sonorités orientales délicates des Râga. Parfois, lorsque le silence des sables se fait trop pesant lors de notre lente avancée, elle redonne à nos corps ralentis, le rythme par les sons portés de la Vīnā carnatique ou de la Ney, la flûte persane.
Lorsque notre marche est apathique, nous voyons Reg sur sa rapide monture, passer par notre flanc gauche, pour aller inspecter à l’avant de notre caravane et vérifier ce qui s’y passe, voire souffler une ou deux plaisanteries subtiles à nos éclaireurs, au cas où leurs esprits s’endormiraient. Reg est habile au jeu des mots !
Puis, Reg revient par la droite pour aller soutenir quelques instants nos amis qui ferment la marche, loin derrière nous.
Reg est toujours là tout en ayant l’air de ne pas y être.
C’est une timide audacieuse.
Sa fidélité est exemplaire, son amitié chaleureuse, sa dévotion au savoir yoguique inébranlable. Elle dit souvent que l’enseignement lui sauva la vie.

En bougeant ma main droite qui me soutenait dans le sable, alors que mes paupières s’alourdissent d’avoir tant scruté le ciel, mes doigts rencontrent quelques dattes fraiches ainsi qu’un petit pot de lait de chèvre, posés là, sur un tissu... vert.. lui aussi…
Longue vie à Reg.

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Les animaux se sont tus. Il est temps de ramasser votre plaid sur votre corps. Il est temps de faire silence et laisser le velours de la nuit nous envahir.
Hari om tat sat
Jaya yogācāryaḥ

Remerciements à C. Pellorce pour la correction

©Centre Jaya de Yoga Vedanta Ile de la Réunion

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